Reims, 3 septembre 2021
“Cette année est particulière. On aura tout eu dans les vignes en Champagne !” s'exclame Isabelle Tellier, Chef de cave de la maison Chanoine Frères. “Après les coups de gel sévères de début avril et de début mai, puis un mois de mai froid et pluvieux et la grêle dans certains secteurs, il y a eu le mildiou et ensuite le botrytis ! On ne peut pas dire que les conditions climatiques et sanitaires aient été favorables et ce, alors que la demande est bien orientée.”
Des rendements attendus en forte baisse
Avec tous ces aléas qui affectent le volume de la production, l’impact global du gel est évalué à -30% et l’impact du mildiou est estimé entre -20% et -25% sur tout le vignoble : on peut s’attendre à un rendement bien en-dessous de l’appellation réglementée, fixée cette année jusqu’à 13 100 kg de raisin à l’hectare ; sachant que les kilos récoltés entre 10 000 et 13 100 kg seront mis en réserve. Dans certains endroits, on craint de ne pas dépasser 5 000 kg.
Le “bio” sinistré ?
Cette année en tout cas a des conséquences particulièrement sévères pour le bio. La vigne cultivée en bio n’est pas à la fête en Champagne. Dans certaines vignes, il n’y a plus rien du tout, ni feuille, ni raisin. D’autres parcelles sont attendues à 2 000 kg à l’hectare seulement ! En Champagne, vu la variabilité des conditions climatiques et sanitaires et leur impact, l’agriculture raisonnée paraît plus “raisonnable” pour les vignes et les vignerons, que le bio.
Dernier aléas en date, la survenue du botrytis, un champignon qui provoque de la pourriture sur certains grains au sein d’une même grappe. “Même si toute la grappe n’est pas abîmée, elle ne sera pas récoltée, on ne la prendra pas. Et cette année, on n’y pourra rien faire car, à partir d’un mois avant les vendanges, il n'est plus possible de traiter les vignes en Champagne.”
Après la véraison, la maturation
La véraison, c’est à dire le changement de couleur des baies qui signale le début de la maturation des grains, a eu lieu le 12 août — la véraison des premières baies ayant été constatée début août dans les secteurs les plus hâtifs comme sur les Pinots noirs des Riceys. Isabelle Tellier observe que “la véraison 2021 s’est déroulée avec sept jours de retard par rapport à la moyenne décennale ; on est bien loin de la précocité de l’an dernier où elle était arrivée fin juillet.”
La maturation — le moment où les raisins grossissent tandis que la proportion de sucre croît, alors que celle d’acide diminue — s’est effectuée pendant un mois d’août dont le début a été froid et humide en Champagne. A fin août on constate un rapport sucre/acide dans une moyenne basse, ce qui témoigne d’une acidité totale élevée sur les trois cépages champenois. Pour Isabelle Tellier, “ce sont des données plutôt favorables ; on demande de bonnes acidités pour garder de la fraîcheur dans les cuvées, c’est un critère important de mon point de vue.”
Trier la vendange
“En fonction des prélèvements effectués fin août pour mesurer le taux d’alcool et le poids des grappes, je verrais bien les vendanges débuter la semaine du 13 septembre. Cela évolue bien actuellement, la maturation s’accélère depuis quelques jours, la dynamique est bonne, mais ne nous précipitons pas.”
Selon Isabelle Tellier, la vendange 2021 va demander beaucoup d’attention et de soin, “du fait de tous les aléas climatiques et sanitaires, cette année est marquée par l’hétérogénéité des secteurs viticoles. Et même par l’hétérogénéité à l’intérieur d’une même parcelle. Lors de la vendange, il va donc falloir être vigilant et trier les raisins plus que jamais. Le mot d’ordre est de ne cueillir que ce qui est bon et sachant qu’en Champagne on ne cueille que la grappe entière, la récolte devrait être très sélective.”
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